samedi 8 mars 2014

Réfléchir quand même...

Annick Cojean, reporter au Monde, est donc revenue de Syrie.

J'ai lu sa double page dans le Monde, cette semaine. Ma femme aussi.
J'ai fait lire l'article à un collègue dans mon bureau.

Au début, il a sorti quelques gros mots. Et puis, il s'est tassé sur sa chaise, il a fini de lire.
Il a refermé le journal et n'a plus rien dit. Moi non plus...

Parce que tellement insoutenable, l'article n'est pas lisible.

Annick Cojean estime que l'on peut parler de 50 000 viols... Enfin les témoignages sont très compliqués à obtenir. Très probablement, les vagues de réfugiés qui se créent aujourd'hui en Syrie sont liés à la panique face à la campagne de viols organisée par le pouvoir officiel. Des frères sont décapités parce qu'ils refusent de violer leurs soeurs, des pères assistent aux viols collectifs de leur fille... Celui de la fille d'un célèbre opposant au régime est sur le net. Pendant un mois, une mère et sa fille ont été violée parce que la petite avait le drapeau de l'insurrection sur son portable.

Il faut réfléchir, mais là j'ai du mal.
J'ai vraiment du mal.

Selon les quelques témoignages que l'on recueille dans les camps de réfugiés, il semble que cette situation soient encadrée, voulue, organisée. Il s'agit très probablement au moins d'un crime de guerre...

Le ministre des affaires étrangères quatariens l'avait dit à la France... Au moins, on aura été les derniers à défendre l'idée d'une intervention en Syrie. Avant que plus personne ne l'ose.

Croyait-on vraiment que rien faire n'aurait pas de prix ?

5 commentaires:

  1. Je suis en train de lire les pages de son enquête.
    Une nausée rageuse dans mes tripes de femme.
    Comment lire cela sans la culpabilité d'une vie bien tranquille à l'abri des horreurs dont ces hommes, là-bas, sont capables?!
    Comment ne pas se dire qu'en ne faisant rien on devient complices de cela qui se passe pas trop loin, sous nos yeux?!
    Comment... comment... comment?!

    Merci, Nicolas!
    Je vous lis, parfois, sans laisser de trace.
    Cette fois-ci, j'en laisse une. Si insignifiante...

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    1. Ces hommes ... qui n'ont rien de plus ni de moins que les autres.

      Complice je ne sais pas trop. Il faut en parler, autour de soi. Ce n'est pas difficile... C'est le but de l'article.

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  2. Oui, peut-être, comme vous dites: ces hommes (là-bas) qui n'ont rien de plus ni de moins que les autres.
    Mais justement, il me semble qu'il faut avoir quelque chose de plus ou de moins que la plupart de tous les autres pour être capable de telles horreurs. Là-bas, comme ailleurs et même très par chez nous.
    Quant à ma question sur "complice" ou pas, c'était par rapport à l'inaction de nos dirigeants face à cela, à tout ce qui se passe en Syrie.
    Ce fut ma réaction à chaud suite à la lecture de l'article.

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    1. Vaste question que de savoir qui sont ces hommes là. Je crois qu'il ne faut surtout pas dire "là-bas", et déjà les mettre à distance comme si cela ne pouvait pas être nous.
      Là bas dans la zone dans grands lacs en Afrique,
      Là bas en Syrie...

      Mais si, cela pourrait être nous. Il y a 10 000 viols par an déclaré en France. Et ici comme là-bas, souvent on ne le dit pas. Nous ne sommes pas non plus beaucoup plus bienveillants à l'égard de ces victimes ici que là.

      Alors qui sont ces hommes ? N'importe qui. Un peu de doctrine, beaucoup d'alcool et voilà, les victimes ne sont plus humaines et tout est possible.

      On néglige le rôle de l'alcool ou de la drogue dans ces phénomènes. Jean Hatzfeld en parlait dans "L'air de la Guerre" à propos de la guerre civile en ex-yougoslavie...

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    2. Ensuite, il ne faut pas trop se flageller sur notre complicité.
      La France a cherché à tenir une position mais elle s'est retrouvée seule... Avec cet improbable allié qu'était le Qatar, dont la position était beaucoup plus orientée.

      Et pour être complice, il faut avoir fait aussi, ce qui n'est pas le cas. Ce qui ne veut pas dire que nous n'avons pas une part de responsabilité.

      Ce qui est surtout terrible, c'est le silence. La question du viol en Syrie n'est même pas nouvelle. Les premiers papiers, les premières rumeurs datent d'il y a plusieurs mois. Mais la question n'apparaît pas dans un débat où l'on oppose, selon le mode russe, le terrorisme à l'anti-terrorisme.

      Finalement, soutenir l'antiterrorisme en Syrie, c'est facile et très intéressant. Religieusement, politiquement, diplomatiquement...

      Sur la rebellion en revanche, on ne met aucun visage.
      Ni le policier syrien, ni nous.

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