mardi 29 avril 2014

Le client, ce bovidé.

Des lobbys de l'agro-alimentaire ont le ferme projet de remplacer les dénominations de pièces de boucherie que vous connaissez peut-être encore, onglet, tende, araignée, tende... par des termes un peu plus marchandisés.

Vous allez désormais choisir du steak trois étoiles, ce qui correspondra, il faudra le croire, à une pièce tout à fait tendre. Le une étoile, c'est de la semelle pour Roumains.

Alors, tous les lobbyistes ne sont pas unanimes sur le sujet... On se demande bien un peu, si cette façon d'arnaquer le consommateur n'est pas un peu visible quand même. Certes, l'important est que vous achetiez ce qu'on veut vous vendre et non ce que vous voulez consommer. Faudra le temps disons...

C'est intéressant cette affaire; sur cette question de la bouffe, nous sommes en alerte nous français, cela ne nous plaît pas qu'on touche à notre assiette. Mais ce principe du marketing qui consiste à faire disparaître les caractéristiques objectives du produit pour mieux proposer des échelles de valeurs déjà organisées est un lieu commun de notre vie quotidienne.

La réalité concrète de notre quotidien nous échappe. Ce n'est pas parce-qu'il a un turbo dans votre voiture que désormais, c'est écrit dessus, au contraire de ce qui se faisait dans les années 1980. Vous vous demandez même pourquoi c'est important de savoir si un moteur est atmosphérique ou turbo-combressé. Vous avez abandonné votre propre légitimité à savoir.

Du moment que votre achat correspond à l'image que vous vous faite de vous-même, vous êtes satisfaits. Vous avez perdu toute autonomie, vous ne choisissez rien ... mais vous achetez quand même ce bien qui va vous relier à votre monde imaginaire, dans lequel on vous a fait entrer et où l'on va vous maintenir.

C'est puissant le marketing.
Il s'agit quand même, tout comme le management, de faire faire quelque-chose à quelqu'un sans qu'il s'en rende compte. On oublie trop que ces techniques commerciales proviennent des sciences sociales américaines et que ces sciences sociales ont grandis sur des expériences militaires, notamment celle du Viet-nam.

Il s'agit, encore et toujours, de traiter la cible.
Vous.

Va là, mange, meurt.

Zukerberg vous l'a dit pourtant: ne mangez que la viande que vous êtes capable de tuer.
Sinon, vous êtes foutus.
Car c'est celui qui tue la viande qui décide.

samedi 12 avril 2014

Espace public et autres considérations

La notion "d'Espace public" est une idée de la philosophie politique particulièrement complexe à discuter.

Je reprends cette petite présentation de Thierry Paquot pour vous situer rapidement les choses:

            "Au singulier, l'espace public désigne la sphère du débat politique, la publicité des opinions privées, qui participent à la vie commune en devenant publiques. Au pluriel, les espaces publics, depuis une trentaine d'années en France, correspondent au réseau viaire, rues et boulevards, places et parvis, parcs et jardins, bref à toutes les voies de circulation qui sont ouvertes au public. Les deux ont, par conséquent, à voir avec la communication. La mondialisation de l'économie capitaliste, la révolution communicationnelle, la mutation des supports médiatiques (appartenant à une poignée d'entreprises), le déploiement de la vidéosurveillance, la construction de murs, la privatisation de nombreux territoires urbains « effacent » les espaces publics, entravant ainsi l'émergence d'expériences alternatives. L'urbanisation planétaire, avec les centres commerciaux, le tourisme de masse, le mobilier urbain, les enclaves sécurisées, etc., transforme les usages des espaces publics et les uniformise. Pourtant, des résistances se manifestent (spectacles de rue, code de la rue, cyber-rue, etc.) et associent aux espaces publics, gratuits et accessibles, l'esprit de la ville".

Cette "sphère du débat politique" est un principe particulièrement ardu à définir; le terme d'ailleurs de "sphère" est bien flou d'emblée.

L'un des principes de notre Espace public en France est constitué par ce que l'on appelle l'Intérêt général. Cette idée est notre référence à tous même on l'oublie bien souvent. Dans nos tribunaux, l'un de ses garant est ce que l'on appelle le ministère public. PLus localement, il s'agit du préfêt; dans nos hautes juridictions, il se nomme encore commissaire du gouvernement. Ils sont les hommes et les symboles d'une République aux ambitions extrêmes, mais que plus personne ne comprend et ne défend. Nous n'avons plus les moyens de ce luxe institutionnel.

Etrangement, on nous dit que la vie privée est aujourd'hui menacée. En réalité, c'est bien la vie ou l'espace public qui s'effondrent, et avec eux toutes les institutions qui s'étaient données pour mission de défendre justement la vie privée, par exemple. Dans un même mouvement la vie privée et l'espace public sont attaqués.

Or, il se trouve que L'Europe s'engage dans un cycle de négociation avec les Etats-unis sur le commerce et le libre échange,  période qui promet d'être cruciale. Marianne vient de titrer "comment les Etats-unis vont nous bouffer...". Allons bon ? C'est à ce point. Oui, et ce n'est pas une surprise.

Amis lecteurs, tu vas apprendre à devenir un colonisé.
Pour un Français, c'est assez nouveau faut avouer.

Concrètement, l'enjeu est de savoir comment nous allons faire pour éviter que l'Etat français soit mis en accusation devant des juridictions internationales qui nous "échappent", par des multinationales sur-puissantes, pour son refus de l'exploitation du gaz de schiste. Par exemple.

Le Canard enchaîné remarquait la semaine dernière que le Canada avait perdu à peu près tous ces procès contre les Etats-unis dans le cadre de l'ALENA. Inquiétant non ?

Plus que le gaz de schiste, c'est en premier lieu l'agriculture qui va être au coeur des débats. C'est qu'en France, il y a du fric à faire. On est encore au moyen-âge du machinisme et des gens puissants ont de grands projets pour nous. Guerre de l'eau, guerre du lait, guerre de la graines. L'histoire est loin d'être finie.

Je reviens à mon sujet: ces négociations n'ont clairement rien de démocratiques. Chez Monsanto, on ne vote pas, on est corporate... Quand bien même, la liberté des commerçants ira l'encontre de l'intérêt général des citoyens, ces derniers qui ne sont d'abord que des clients devront se taire. Il n'y aura pas l'espace pour protester.

Chacun sent bien aujourd'hui que notre monde ne progresse plus au vu de principes généraux "sociaux" mais qu'il évolue au gré de l'affrontement des lobbys, des groupes de pressions et des intérêts économiques. Et ces gens, contrairement aux apparences, ont comme par hasard horreur de la publicité.
Surtout gratuite.

Ils n'aiment pas trop la possibilité même d'un espace public.

Il y en a qui par contre à tout mis sur place publique: le dénommé Snowden. On n'a pas bien mesuré la valeur historique de l'affaire. Qu'est que dit de l'Amérique cette trahison du 21ème siècle ? Qui donc peut raisonnablement croire que le sens de l'Histoire va de l'Ouest vers l'Est ? La guerre froide est finie, tout a changé. Alors comment comprendre cette affaire ?

Et comme corollaire simple, peut-on encore aujourd'hui croire en l'Amérique ? Qu'avons nous encore de commun avec ce pays du bic mac et des armes en vente libre ... Au milieu, la vieille Europe et ses idées incompréhensibles va être la victime toute désignée de l'affrontement des gros.

Alors, à la limite, s'il fallait choisir, je sais bien que je n'hésiterai pas une seule seconde.
Vous la voyez vous la frontière entre la Russie et l'Europe ?

Identité

Je suppose qu'il ne faut pas mettre sur le même plan l'identité hétérosexuelle, homosexuelle ou autres et le comportement que l'on nomme bisexualité.

L'identité sexuelle comme toute identité se constitue sur la ressemblance. Nous ressemblons à nos parents et de là nait l'identité familiale. La bi ou multi-sexualité si tant est qu'elle puisse exister constitue au contraire une absence de sentiment de ressemblance, ce qui n'empêche en rien qu'ensuite se constitue le groupe de ceux qui ne savent pas à quoi ils ressemblent.

Il est de bon ton de dire qu'il faut combattre les identités car elles seraient trop stigmatisantes. Ce serait oublier trop vite qu'on se sait pas exister sans se comparer, sans se définir par le biais d'identités existantes.

Donner le choix à un enfant de sa sexualité ou de sa religion le place face à une angoisse existentielle qui encore une fois, ne peut aboutir qu'à de la violence.

Si je ne ressemble pas à un garçon ou à une fille, je ne suis rien.
En théorie.

Apprendre aux garçons à jouer à la poupée peut être une possibilité, mais la nécessité première réside dans l'intégration à une identité masculine.

On croit que l'individualité se forge dans une lutte contre les identités.
C'est l'inverse.

Quelqu'un me disait un jour, c'est en uniforme qu'on reconnait les caractères.
C'est effectivement dans l'unité d'un groupe, sur cette base solide et indiscutable que la personnalité peut librement se déployer.

Sans identités, il n'y a qu'aliénation, chaos psychologique et encore une fois, violence.

Tout comme le militaire ne décide pas de son uniforme, de ce qui est unique, nous ne décidons pas non plus de notre sexualité.

Je revendique n'avoir jamais, de toute ma vie, choisi la moindre orientation sexuelle.
Je ne sais rien de la genèse de mon identité sexuelle.

Et je la transgresserai d'autant plus facilement qu'elle est forte.

samedi 5 avril 2014

vendredi 4 avril 2014

Cinéma

Je vous conseille très vivement d'aller voir le dernier film de Jim Jarmusch, Only lovers left alive.

Rien que pour ce si joli titre, allez-y.

Et puis pour la bande son, comme d'habitude chez Jarmusch, planante, sophistiquée, parfaite.




Il s'agit donc d'un film de vampires.
Enfin, disons que les codes du mythe sont respectés. Ils doivent se nourrir de sang, meurent d'une balle en bois dans le coeur, et trainent au lit le soir quand il faut se réveiller.

Mais ce qu'ils font et ce qu'il advient, importent peu.
Les vampire sont au-dessus mais ils ont besoin de nous. Et nous sommes contaminés... Ils sont fragiles, comme nous. Seuls, très seuls, à en mourir.

Il s'agit d'un couple, pourtant.

Lui vit à Détroit, elle à Tanger. Ambiance magique et fantastique dans ces deux villes hors du temps et du monde que Jarmusch a recrée pour donner un environnement à ces amoureux rocks et romantiques.

Au début, on a un peu peur... A là fin, presque nous voudrions rester.
Pourtant, je n'ai pas été mordu.

Lui s'appelle Adam. Elle Eve. Il a un plan dans un hôpital pour récupérer du sang. En ce faisant passer pour le docteur Faust. Oui un peu d'humour, parfois, et puis voilà.

L'ambiance, surtout et toujours.
Ce que l'on veut, encore et encore, c'est se balader dans Détroit la nuit, avec Adam et Eve.

Une nuit, roulant dans sa vieille jaguar blanche, il explique à Eve qui regarde la Lune, que là-bas loin, une naine blanche, un diamant vibre comme un gong spatial.

Or, oui aujourd'hui nous savons que les étoiles, surtout les plus denses, vibrent et font de la ... musique.
Qui sait aujourd'hui que les scientifiques écoutent les étoiles bien plus qu'ils ne les voient ? Bien sur, la science et la poésie, ses deux soeurs complices.

Et puis, cette chanteuse libanaise dans un rad de Tanger... L'éternité incarnée.

Et, puis à la fin, repartir à la chasse.
Toujours.

Car, le temps passe.
De façon relative.


L'autonomie

Je vois cette pub parfaite qui nous vante l'aide au démarrage en côte. Qui nous prouve encore que ce n'est pas parce qu'on n'en a pas besoin que l'on en aura pas envie.

Je lis cette étrange idée de Jacques Testard qui demande dans son dernier livre aux couples homo qui veulent des enfants pourquoi ils viennent voir un docteur alors qu'ils ne sont pas malades...

Je lis les nouvelles où l'on m'informe que la France va abreuver la Chine de son lait.

Et notre autonomie dans tout ça?

Les biens de consommations nous font perdre le bon sens pratique, le scientifique devient notre seul recours, illusoire et malhonnête et votre économie vous quitte.

Partout dans le monde, la terre est rachetée.

Et si demain, attaquer une capitale devenait un jeu d'enfant ?
Et si demain, ne sachant plus faire qu'une chose, votre métier, nous ne saviez plus faire grand chose...
Et si demain, encore un peu titulaire du droit de vote, vous ne le considériez plus que comme un évènement amusant ?

Je vous parie que vous allez perdre votre autonomie.
Demain, nous serez normaux.



Je vois tous ces immeubles de verre qui poussent autour de Paris, et à l'intérieur desquels je ne vois rien.
Je sais encore que si tout ce verre tombe, je suis mort.

Alors, je ne lutte pas.